« Par ailleurs, Living Carbon affirme être en train de développer une autre innovation. Cette dernière permettrait de réduire la quantité de carbone rejetée par les arbres morts en décomposition. Selon les responsables, le but est de permettre à l’arbre de capter le cuivre et le nickel dans le sol afin de détruire les champignons responsables de la décomposition du bois. »
Bon … là, c’est grave. Les mecs sont en train de dire qu’il faut bloquer l’activité biologique du sol pour séquestrer le carbone dans les arbres morts. Ok champion ! Sur quel support un arbre pousse ? Un sol vivant ! On en fait quoi de tous ces arbres morts ? Parce que si on en fait du bois-énergie1, on a raté un truc. T’as remarqué que raté, c’est l’anagramme de taré ?
Au carbonifère, il y avait eu un soucis. Les végétaux avaient trouvé le moyen de se fabriquer des troncs pérennes en ajoutant de la lignine2 à leurs cellules pour les rigidifier. Par contre, aucun organisme n’était capable de digérer cette molécule. Les cadavres des arbres morts restaient au sol pendant des milliers d’années. Ils ont finis par se retrouver sous terre par divers processus et par d’autres processus, ça à donné du charbon et du pétrole. La lignine était, par définition, un déchet. Personne n’en voulait. Et alors ? Et alors !?!
Zorro est arrivé, sans se presser3. Le champignon, mon mignon ! Et pas n’importe lequel. Le lignivore. C’est-à-dire qu’à un moment, t’as un organisme qui s’est dit en contemplant tous ces arbres :
— C’est quand même malheureux ! Que d’eau, que d’eau et pas un goutte à boire4.
Il s’est mis au boulot. Comme personne d’autre ne voulait de la lignine, il en a fait ses choux gras. Le mec invente l’économie circulaire dans la foulée. Grande époque. Il ouvre grand la porte5 aux autres organismes qui peuvent se nourrir des restes carbonés des géants végétaux. Voilà comment nous ne croulons pas aujourd’hui sous des milliards de milliards de cadavres d’arbres. Bon, par contre, tout le carbone séquestré dans le charbon qu’on appelle aussi lignite et le pétrole, ça fait quelques siècles qu’on met un point d’honneur à le relâcher dans l’atmosphère. Carbone qui s’oxyde aussitôt et paf, CO2 ! Vous l’avez pas vu venir celle-là ?
Heureusement que les végétaux terrestres, ils adorent ça, le CO2. Ils vont grandir plus vite, relâcher plus d’oxygène. En quelques milliers d’années, les seuils seront de nouveau stabilisés. Reste à savoir si notre civilisation carbonique y survivra. L’humanité oui, elle s’adaptera une nouvelle fois.
Pour en finir, la clé n’est pas le dioxyde de carbone qui est une conséquence, mais ces deux constituants. Carbone et dioxygène. Si on stoppe la production d’oxygène, y a plus d’oxydation donc plus de dioxyde de carbone. Voyez ? Le problème n’est jamais que dans l’œil de celui qui le regarde. Comme quoi, quand tu penses être au fond du trou, y a toujours deux tarés. Un qui vend des pioches et l’autre qui les achètent.
- 1 autrefois appelé bois de chauffage mais c’est moins mainstream
- 2 molécule complexe et majoritaire avec la cellulose dans le bois
- 3 cf. Henry Salvador. Ne me remerciez pas. La chanson reste longtemps dans la tête
- 4 Inspiré de La Complainte du vieux marin (titre original The Rime of the Ancient Mariner) qui est un poème de l’auteur britannique Samuel Taylor Coleridge
- 5 terme non encore inventé à l’époque, c’est dire l’avance considérable du champignon !
Sources :
http://www.valbiom.be/files/gallery/rapportlignine2411101294320328.pdf
http://www.snv.jussieu.fr/bmedia/bois/bois_chimie.htm